Gestion des talents en entreprise, quelle stratégie adopter?

Au moment de rédiger ces lignes, il y avait sur Google 30 600 000 recherches en français sur le mot-clé : gestion des talents! C’est dire si de nombreuses personnes s’intéressent à ce sujet passionnant. Et cela donne un aperçu des mystères qu’il reste à éclaircir sur sa définition et son application en entreprise!

Neuligent vous éclaire sur la gestion des talents en entreprises, ses différentes applications et ses implications.

Pourquoi autant d’attrait autour de la gestion des talents en entreprise?

Le concept de gestion des talents a émergé avec la bulle Internet dans les années 1990-2000. Depuis il a été largement identifié dans la littérature scientifique comme un important enjeu de gestion pour les organisations.

Le terme « guerre des talents » a même été consacré en 2001 par Michaels, Handfield-Jones, Aselrod dans leur rapport The War for Talent (Harvard Business Press). Décrivant le contexte de rareté des talents dans une Amérique en plein essor économique, il a mis de l’avant les notions élitistes « d’employés les plus performants », « de population à haute valeur ajoutée ou hautement qualifiée ».

Qu’est-ce que la majorité d’entre nous voit dans le terme «talent»?

Son utilisation sémantique, bien que très variée, est généralement positive. Il y a unanimité sur ce point, tant dans les dictionnaires que dans la littérature professionnelle ou scientifique. Selon le contexte dans lequel il est employé, il peut par contre renvoyer soit à un sujet ou à un objet :

  • Lorsqu’il est employé pour définir une aptitude ou une capacité supérieure à la moyenne d’une personne, ce terme fait référence à un talent en tant qu’objet.
  • En revanche, dans le terme « acquisition de talent » dont on fait souvent usage en entreprise, il fait plutôt référence au sujet. Il s’agit alors de la personne que l’on souhaite recruter, et non l’une de ses caractéristiques en particulier.

En management, la terminologie de « gestion des talents » est souvent corrélée, ou substituée par la « gestion des compétences ». L’usage de ces terminologies est proche. Il n’est donc pas rare de penser à la gestion des talents comme à la recherche des aptitudes innées ou acquises d’un individu. Cela le place dans une vision dynamique de la performance au travail.

Considérant la quantité d’informations qui gravitent autour de la gestion des talents en entreprise, nombre de professionnels tentent de trouver des points de repère pour mieux comprendre et choisir les pratiques à adopter dans ce domaine.

Ressources humaines et gestion des talents en entreprise

En tant que professionnel.le ou gestionnaire RH, votre avis est important pour orienter le processus de gestion des talents. Et vous devez aussi rendre compte de la performance des individus dans vos fonctions.

Vous aimeriez éclaircir votre compréhension de la gestion des talents et trouver la méthode qui conviendra le mieux à votre entreprise? Voici quelques pistes de solutions pour vous y aider.

Pour commencer, il est intéressant que vous puissiez comparer les deux grands types de gestion dont il est fréquemment question dans la gestion des talents. Ainsi, vous serez au fait des bénéfices et inconvénients de chacun pour mieux choisir le modèle qui vous convient.

Dans la gestion des talents en entreprise, il y a un débat classique courant : doit-on réaliser cette gestion dans une logique « exclusive » ou plutôt « inclusive »? Ces deux types de gestion se basent sur une vision différente des personnes. Pour autant, les deux approches ont chacune leurs atouts et leurs limites. Voyez laquelle pourrait être la plus prometteuse dans votre organisation.

Qu’est-qu’une gestion des talents en entreprise « exclusive »?

gestion des talents en entreprise exclusive

Cette approche est basée sur une vision élitiste des personnes. Celles-ci sont reconnues comme talents ou « hauts potentiels » essentiels au succès de l’organisation. Elle se distingue par une fragmentation entre une minorité valorisée pour ses talents ou son potentiel élevé et le reste des membres de l’organisation.

Dans cette logique de différenciation des effectifs, l’entreprise considère qu’elle influencera positivement sa performance organisationnelle en avantageant ses ressources-clefs ou rares. Par leur niveau de contribution hors norme, ces personnes représentent un avantage concurrentiel plus élevé aux yeux de l’entreprise.

C’est pourquoi elle est prête à payer plus cher pour acquérir ces hauts potentiels et les retenir en emploi. Elle les valorise par ses politiques de gestion des ressources humaines (accès à des formations spécifiques, coaching, missions valorisantes) et son style de management. L’entreprise leur consacre une grande partie de ses ressources.

Pour s’assurer de maintenir son avantage compétitif, l’entreprise va par exemple se constituer un vivier de talents à haut potentiel. Elle y qualifiera des personnes qui ont accompli, ou pourraient fournir, un travail de qualité très supérieure. Elle identifiera donc des employé.e.s à fort potentiel. Ils se démarquent par des réalisations en un temps record, des innovations visant à résoudre des problématiques ou encore à générer des initiatives bénéfiques pour l’entreprise.

Dans la littérature scientifique, on estime entre 5% à 10% la proportion des employés qui appartient à ce groupe des hauts talents, pour un âge et un domaine d’expertise donné.

Qu’est-ce que la logique de gestion de talents inclusive?

gestion de talents inclusive

Par opposition à une gestion élitiste, l’entreprise considère que les individus peuvent avoir des talents de différentes natures. Elle estime que tout le monde en détient. L’entreprise s’efforce donc de bâtir des politiques RH qui reconnaissent et valorisent cette diversité. Pour ce faire, elle met l’emphase sur le développement et la croissance de toutes les personnes qui composent l’organisation.

Cette manière de voir en chaque personne une somme de talents potentiels se rapproche des fondements de la psychologie positive. Elle considère que chaque individu peut développer ses talents au cours de sa vie par ses apprentissages et/ou ses expériences.

Finalement, l’approche inclusive renvoie au principe que les entreprises font du profit et atteignent le succès grâce à l’ensemble du personnel. Même les petites mains sont essentielles dans le succès de l’entreprise et de son essor.

Considérant ces deux formes de gestion, quel choix font les entreprises à cet égard et surtout pourquoi?

Les pratiques privilégiées de gestion des talents en entreprise

pratique gestion de talents en entreprise

Statistiquement parlant, la majorité des entreprises opte pour l’approche exclusive. Pourquoi ces entreprises se sont-elles tournées vers cette forme de gestion? Car c’est celle qui semble offrir a priori le plus de retour sur investissement. « Acheter » des talents reconnus comme potentiellement élevés semble alors plus profitable que de les « développer ».

Dans la littérature scientifique, on compare souvent cette approche au Matthew Effect. Cette approche fait référence à l’évangile selon Saint Matthieu : « on donnera à celui qui a, et il sera dans l’abondance, mais à celui qui n’a pas, on ôtera même ce qu’il a ». Et plus près de notre époque, on retrouve ce concept à travers la maxime « on ne prête qu’aux riches ».

Certaines entreprises utilisent cette approche, car elles disposent d’un historique favorable à ce style de gestion organisationnelle. Qu’elle ait ou non fait l’objet de remise en question dans le temps, cette méthode perdure tant qu’il n’y a pas de changement d’orientation à la direction de l’entreprise.

Dans la pratique, l’entreprise concentre ses ressources vers ce qu’elle considère comme étant le plus rentable. Que ce soit son moyen de production ou de différenciation. Elle mise sur de hauts potentiels pour se doter d’une capacité de performance supérieure. En considérant ses « champions-championnes » comme avantage concurrentiel, elle les place implicitement ou explicitement comme « les modèles à suivre ».

Marque employeur et gestion des talents exclusive

gestion des talents unanimité

Un certain nombre de critiques existent sur l’approche exclusive et notamment sur l’effet qu’elle comporte de nombreux biais d’analyse :

  • L’évaluation du potentiel d’un individu est rarement fondée sur des indicateurs objectifs. C’est sa renommée ou sa notoriété dans un contexte de pratique spécifique qui l’influence.
  • Le repérage d’une personne de « haut talent » varie selon la perception de la personne qui réalise cette activité.
  • L’hypothèse selon laquelle les performances passées d’une personne prédisent ses performances futures est controversée. Pourtant, l’identification ou le recrutement d’employées ou d’employés talentueux se base sur cette hypothèse.
  • L’inégalité de traitement des personnes non identifiées comme de « hauts talents » a des conséquences importantes sur le plan de la justice procédurale et sur leur motivation.
  • Qualifier une personne comme très talentueuse peut entraîner en elle un état de stress supplémentaire par peur de l’échec, ou encore de décevoir les attentes.
  • L’emphase est mise sur l’action individuelle dans une logique de starisation au détriment de la collaboration ou de la performance collective.

Qu’est-ce qui pousse les entreprises à choisir la gestion inclusive des talents

L’approche inclusive offre une répartition plus égalitaire des ressources entre tous les individus de l’entreprise. Elle prévient ainsi une baisse de motivation des employés en les traitants comme égaux. Le climat de travail s’en trouve amélioré et favorise le développement du plein potentiel de chacune des personnes et de l’entreprise.

Certaines études démontrent qu’une trop grande importance accordée à la performance individuelle tend à décourager le développement personnel. En récompensant seulement un petit groupe d’individus, l’approche « exclusive » affaiblit le travail d’équipe par un retour négatif ou neutre de l’engagement des autres membres. Elle augmente aussi le risque de créer une atmosphère qui nuira aux meilleures pratiques de gestion dans l’organisation.

Selon Charles O’Reilly et Jeffrey Pfeffer, auteurs de Hidden Value (HBS Press 2000), la clef du succès d’une entreprise est de construire une organisation qui aide tous les employés à performer comme des stars.

Avantages et critiques de la gestion inclusive des talents

Ce modèle de gestion des talents en entreprise se retrouve dans les approches basées sur les forces. C’est-à-dire dans l’art de reconnaître les talents naturels de chaque employé. C’est pourquoi l’utilisation de différents tests psychométriques peut s’avérer un moyen de reconnaître et valoriser cette diversité en milieu professionnel. C’est notamment le cas du test VIA des psychologues Martin Séligman et Christopher Peterson (2004).

À partir de données indirectes telles que la psychométrie en entreprise, les gestionnaires ou les professionnel.les RH participent davantage au développement de compétences ou de connaissances spécifiques à l’emploi. Ils-elles favorisent ainsi le développement de chaque personne pour transformer un talent en une véritable performance.

Les 2 principales critiques de cette gestion des talents en entreprises sont :

  • Qu’elle rend la distinction difficile entre gestion des talents et gestion stratégique des RH. Cela peut ainsi générer des dépenses supplémentaires inutiles.
  • Qu’elle soumet les managers à une pression accrue pour repérer et faciliter la grande diversité d’expression des talents auprès des membres de l’équipe.

Quelle approche choisir pour votre entreprise?

approche gestion de talents en entreprise

Vous avez pu réaliser que le choix entre ces deux approches dépend en grande partie des efforts de gestion privilégiés par l’entreprise. Et cette décision est généralement en lien étroit avec sa culture, ses valeurs et celles de la haute direction. Des exemples forts existent dans le milieu professionnel pour peser le pour et le contre de ces méthodes afin de définir ou revoir un processus adapté de gestion de talents en entreprise.

Toutefois ces deux approches ne viennent pas avec un mode d’emploi. Et il n’existe aucun outil de mesure adéquat pour comparer objectivement leur résultat. À ce jour, aucun test ne mesure l’expression d’un talent dans un contexte. Il n’existe pas non plus de mesure de la trajectoire d’un talent pour supporter une activité ciblée de développement.

Il y a toutefois de l’espoir sur ces deux points, car ces mesures font l’objet des projets de recherche chez Neuligent. Elles devraient permettre, sur un horizon de 1 à 2 ans, d’apporter un éclairage nouveau à l’entreprise et des repères fiables pour faire un choix objectif en matière de gestion des talents en entreprise.

Ces visions de la nouvelle intelligence au travail vous intéressent? Voyez comment intégrer de nouveaux outils de gestion des talents dans votre entreprise! Prenons le temps d’en discuter!

 

Auteur | Annie Borde, Direction innovation – Neuligent